Grands et petits chemins de Lalobbe
- catherinepaulus
- il y a 1 jour
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Petite chronologie de l'histoire du réseau routier
Après les importants travaux de construction des grandes routes royales au XVIIIe siècle, le XIXe siècle est l'époque de la construction et de la mise en place du réseau secondaire.
Le décret impérial du 16 décembre 1811 organise pour la première fois le réseau de routes de notre pays en définissant leur classement en fonction de leur importance ainsi que leur modalité de construction et d’entretien. Les routes de l’Empire sont divisées en routes impériales et en routes départementales.
Les chemins vicinaux(*) étaient reconnus par une loi de 1793 et il faut attendre 1824 pour les définir précisément comme « nécessaires à la communication des communes » et « à la charge des communes sur le terrain desquelles ils sont établis ».
(*) Vicinal : qui met en relation des villages voisins
Mais les routes départementales sont médiocres et les chemins vicinaux n’existent pratiquement pas. Lorsque l’hiver approche, les roues des charrettes s’embourbent, les essieux cassent. Presque cinq mois par an, il semble impossible de circuler dans les campagnes qui restent un monde clos. La France de 1830 ne compte que 32 000 kilomètres de routes royales reliant Paris à des endroits stratégiques du royaume, grands ports, villes frontalières ou foires.
En 1832-33, seulement 6 routes royales, 4 départementales et 5 chemins de grande communication (environ 100 kms) traversent les Ardennes.
La loi du 21 mai 1836, dite de Thiers-Montalivet, sur les chemins vicinaux marque la naissance de l'organisation vicinale.
Une distinction apparaît entre :
les chemins vicinaux de grande communication reliant plusieurs communes,
les chemins vicinaux de moindre importance dit « chemins vicinaux ordinaires »,
les chemins qui, sans être aussi importants que ceux classés en grande communication, servent cependant à plusieurs communes, dits « chemins d'intérêt collectif, » ou «chemins d'intérêt commun ».
Les municipalités doivent financer ces travaux :
les « centimes spéciaux » (impositions ponctuelles)
les prestations en nature (Impôt direct consistant en journées de travail auxquelles les habitants des communes étaient assujettis pour l'entretien des chemins vicinaux). Des journées de prestations (3 au maximum par an) sont dues par les contribuables qui peuvent s'en acquitter en nature ou en argent, selon un barème défini par le Préfet.
Lalobbe est classé en 2ème catégorie pour les "journées de bras ou journées d'hommes" soit 2 frs par prestations et en 1ère catégorie pour les "journées de charrois".

Ces « prestations », comme on les appelle à l’époque, ne sont rien moins qu’un impôt communal, une corvée que tout chef de famille se doit d’accomplir… et sans toucher le moindre centime de salaire !
Pensez donc : pendant trois jours, ces hommes vont casser du caillou, manier pelles et pioches pour boucher les trous de la chaussée, fignoler sa surface de roulement avec des mètres cubes de gravier, assécher les fondrières, creuser des fossés, ou élargir les chemins devenus trop petits pour une circulation de plus en plus intense. Ceux qui disposent d’un cheval, de bœufs, voire d’un couple de vaches, sont venus avec leurs animaux attelés à leur charrette. Il en est même qu’on voit accompagnés d’un âne, aptes eux aussi à porter du gravier dans leur bât. Tout ce petit monde travaille sous la surveillance d’un employé de la mairie, le « piqueur ». C’est lui qui assigne les tâches à chacun, lui qui houspille les tire-au-flanc, lui encore qui coche les listes pour vérifier que tous sont bien présents sur le chantier.
Êtes-vous trop âgé pour travailler sur ces routes communales ? Ou trop occupé ? Ou trop aisé ? Pas de soucis, vous pourrez vous acquitter de votre « prestation » en payant une taxe, équivalente à quelques journées de salaire.
Ainsi, ce système perdura durant tout le XIXe siècle. Toutefois, ces prestations ne réglaient pourtant pas tout. La faible rentabilité des chantiers amena les municipalités à recruter dans le courant du 19e siècle des cantonniers chargés des travaux d’entretien des chemins
Dès 1881, des cantonniers apparaissent dans les recensements de Lalobbe :
Nicolas Léon Godart de 1881 à 1911. Il reçoit en 1907 reçoit la médaille d'honneur.
Arthur Alphonse Noël de 1891 à 1906
Les chemins de grande communication disparaissent avec un décret loi de 1938 qui précise :
« les routes départementales, les chemins vicinaux de grande communication et d'intérêt commun sont fondus en une seule catégorie de voies dénommées chemins publics départementaux ».
Cette appellation sera modifiée par le code de voirie routière qui reviendra à l'appellation de routes départementales. Le chemin de grande communication n°2 devient la route départementale D2 et par conséquent, cesse d'être à la charge de la commune.
En 1940, le service vicinal est rattaché au service des Ponts-et-Chaussées.
Le chemin de grande communication N°2
Le chemin de Grande Communication N°2 de Tournes à Sévigny-Waleppe passe par Lalobbe. C'est aujourd'hui la D2.

Il commence sur la route royale N°39 (N°51 en 1886) près de Tournes, traverse Ham les Moines, franchit l'Audry au Pont du Mohé, puis passe à Clavy et Warby, Thin le Moutier, Signy-l'Abbaye, Lalobbe, Draize, Givron, Chaumont-Porcien, Remaucourt, Seraincourt, Braye, Hannogne et se termine à Sévigny-Waleppe à la limite du département de l'Aisne.
En 1832-33, seuls cinq chemins de grande communication vicinale sont partiellement construits. Le n°2 est prévu pour se terminer à Signy et ne dessert donc pas Lalobbe , il mesure un peu moins de 24 kms.

En 1838, de grands travaux sont lancés en vue de l'extension et l'amélioration des chemins de grande communication. Le chemin N°2 sera étendu jusque Sévigny sur une longueur totale d'environ 60 kms. Il est inscrit comme étant prioritaire et doit être parmi les "premiers ouverts à la circulation dans un état complet de viabilité". Toutefois dès 1840, le département prévoit qu'ils ne seront achevés que dans 11 ans.
En 1841, il est prévu que le chemin de grande communication passe dans Gauditout pour rejoindre Draize. Mais en 1852, les agents-voyers(*) se rendent compte que la pente de 12 % présente trop de danger et décident de faire passer l'itinéraire à environ 150 m au nord du hameau par la côte Pierrard et la côte Fleury. Environ 18 propriétaires sont expropriés pour la réalisation de ce nouveau tracé.
(*) Fonctionnaire chargé de veiller à l'entretien et/ou à l'aménagement des voies de communication, de la voirie d'une ville, d'un département
Délibération du Conseil Général sur la modification du tracé
Après bien des difficultés notamment dans la construction du pont du Mohé franchissant l'Audry près de Ham les Moines et dans la "dangereuse descente de Signy", c'est en 1861, que les travaux du chemin N°2 seront achevés.

Quelques unes des difficultés rencontrées
Les petits chemins vicinaux ordinaires et les chemins d'intérêt commun
Le territoire de Lalobbe comporte de nombreux petits chemins qui étaient également entretenus par la commune.
Dans plusieurs comptes administratifs de la mairie entre 1891 et 1899, on relève l'entretien de ces voies de communication :
Chemin de la Crotière,
Chemin de la Garenne,
Acqueduc au Bois des Anes
Pont sur le ruisseau de St Nicolas
Terrassement du chemin de Landa
Chemin de Gauditout
Chemin de la Sauge Aux Bois,
Chemin du Laid Trou
Chemin du Huileux,
Passerelle du Laid Trou
Chemin de Rogiville
A découvrir ces chemins d'autrefois sur le cadastre de 1844 consultable sur le site des archives départementales.
Certains reliaient Lalobbe à d'autres communes proches, telle Draize, Montmeillant, Wasigny, La Neuville les Wasigny, d'autres reliaient le village aux hameaux de Lalobbe ou encore à d'autres hameaux tels Maimby, le Courmont ou le Faurigault qui dépendaient de Signy et enfin nombreux étaient les chemins ou sentiers donnant accès à des terres, des prés ou des bois.
Aujourd'hui, quelques uns ont été "macadamisés", comme le chemin de Gauditout, de Rogiville (C10), de la Crotière (C10), de la Sauge aux Bois (D102) ; d'autres sont devenus le GR12 (chemin de la Besace à Lalobbe, chemin du Faubourg et chemin de La Neuville à Lalobbe qui passe par le Laid Trou). Beaucoup sont restés à l'état de chemin rural et certains ont disparu faute d'entretien ou de mise en culture.
Un très vieux chemin
Et pour en terminer avec cette" ballade" sur les chemins, j'ai retrouvé dans le cartulaire de l'Abbaye de Signy, un texte écrit en vieux français datant de 1295 relatif à un chemin qui existe toujours aujourd'hui. Il reliait le Faurigault et la Neuville les Wasigny en passant par la Sauge Aux Bois, à proximité du gîte de Céline Millart.
L'historique de ce chemin

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